vendredi 21 août 2009

Un jour... Un chaton



Rentrée un soir au petit matin… Ou plutôt rentrée un jour au petit matin, l’esprit embrumé par je ne sais quel parfum, quel reste de magie. Je comptais sur une bonne heure voir deux de sommeil pour me remettre encore une fois de ses nuits passées à papoter entre sorcières, à préparer mille et une potion.


Dans mon cabas, quelques fioles restantes, le tout aromatisé aux plantes qui dans un tintement de clochette s’entrechoquent à chacun de mes pas. Rangeant mon balai dans la remise, j’en profite pour ranger sur les étagères les plus hautes mes précieuses fioles, sur lesquelles à la hâte je colle un autocollant DANGER. Etouffant un bâillement d’une main, je referme la remise de l’autre, pour cette fois c’est décidé, m’écrouler sur mon lit.


- MRRwaaaouh, miiiiouuuu, miiiiouuuuuu se fait entendre au pied de mon chêne. Ha non ! Encore une bestiole paumée qui est venue se réfugier dans le coin. Bien décidée à chasser la bête, j’y vais d’un pas conquérant.Une minuscule boule de poil, toute douce, toute noire, grosse comme mon poing qui me regarde de ses immenses yeux verts - presque larmoyants. AAArgh, je fonds instantanément.


- Hooo ben pti Loulou ?! Qu’est-ce que tu fais là toi?


Ça y est, je l’ai presque dans mes bras. Houlà, doucement là … Jusqu’à présent je ne me suis jamais encombré d’un homme, j’ai déjà un balai, je vais pas en plus m’emmerder avec un chat ?! Mon esprit carbure à toute vitesse, ben quoi ?! Un chat ? C’est indépendant non ? Et puis si c’est un mâle c’est encore mieux ? Vite fait, je vérifie, bascule le chat sur le dos, et m’apparaisse les jolis bijoux de famille. Bon c’est sûr c’est un matou.


J’adopte donc cette boule de poil, qui j’avoue c’est si bien y faire, que je ne peux rien lui refuser, ni mon lit, ni une à deux bonnes gamelles de lait. Un soir d’orage, alors que son ombre est amplifiée par un éclair, je le nomme Belzébuth. Il en ronronne de bonheur, s’entortillant dans mes jambes dès le moindre pas.


Le temps faisant, on se cale l’un sur l’autre, affectueux, protecteur -il faut dire que le matou profite vite et bien, c’est comme si j’avais un homme à la maison, la conversation en moins (ainsi que les câlins aussi). Sauf qu’en parlant d’homme… C’était le désert affectif, le plus complet ! La faute au chat d’ailleurs ! Môssieur jaloux, sautait à griffes ouvertes et vengeresses sur l’infortuné qui passait la porte et m’enlaçait. Belzébuth était le pire des chaperons et me forçait à l’abstinence la plus totale. Résignée, à force de devoir m’excuser et panser les blessures, j’en venais presque à vouloir prendre le voile, mais l’idée de découcher me vient heureusement bien vite !


Lors d’une de mes absences, malgré le gigot et le lait laissés dans la gamelle. Belzébuth se glissa dans la remise à balai pour y chasser la musaraigne. La souri se défendit tellement bien qu’elle échafauda les étagères, que d’un bond je pense gracieux, matou grimpa. Il s’en suivit une bagarre intense (aux dires des dégâts occasionnés), souri, chat et fioles se répandirent par terre. Je pense que les deux durent plus ou moins boire les potions. Je vois encore un énorme papillon à moustache et queue de souri qui volète dans les environs. Mais Belzébuth lui… tomba sur la pire des fioles.. Celle puissante ! Aux hormones, phéromone, testostérone qui lui développa très, mais alors très rapidement l’instinct sexuel.


Les minettes des environs, qui passèrent les premières à la casserole y ont laissées leurs vies. Abruties de plaisir, et de fatigue. Il me fallut concocter à la hâte une potion que je distribuais aux félines du coin pour résister à la puissance des assauts de mon matou. J’ai tout essayé, sortilèges, potions, y a pas moyen de lui ôter ce pouvoir. L’est tombé dedans petit comme Obélix !!


Seul truc positif… Il se fout maintenant carrément de ma vie sexuelle à moi ! Tranquille la fille.

lundi 17 août 2009

Aux origines de Maïa

Bonjour Docteur,

J’peux vous parler vite fait sur la gaz là ?! Un besoin urgent, pressant, une parenthèse dans ma vie de sorcière… Je commence par quoi ? Le début de moi ? Mes origines ?

Je suis née à cheval un pied dans l’océan et un autre dans la vigne, d’un père mi-pirate, mi coureur de jupons, mais grand Géo Trouvetout et d’une mère fée de la nature. Elevée tantôt à bord d’un bateau, tantôt aux fins fonds d’une forêt, mon enfance (bienheureuse) était bercée par le doux clapotis de la mer ou le gazouillis des oiseaux.

Me voici à l’âge de 4 ans habillée de fougères et de pommes de pins à courser les écureuils dans les fougères, et à 7, déjà le pied marin à taper des roupillons dans le nez du bateau pour la première sortie en mer. Jouant tantôt au pirate, tantôt à tarzan, m’inventant des histoires au gré du vent.

J’y ai appris l’éveil à la nature… Ou ma fée de mère ne trouvait rien de mieux que de me réveiller aux aurores pour voir une biche boire à l’étang, et mon gueulard de père à m’entrainer à piloter un bateau. Maman aux mains si douces, que le moindre bobo au ventre disparaissait par enchantement ; papa plein d’idées, de trouvailles et de projets qui se construisait un ascenseur pour leurs vieux jours. Petit homme pas bien épais mais que la volonté faisait avancer contre vents et marées, obstiné, têtu et impatient (traits dont j’ai hérité, ainsi que ses yeux noisettes). De maman, je tiens les traits du visage, la douceur des gestes, la magie des mots. Ma rousseur était une surprise ! Un souvenir d’une arrière grand-mère Irlandaise ou une fille par génération choppe au vol taches de rousseurs et cheveux auburn.

A la maison, point de sortilèges et de magies ! Strictement interdit ! Ça et les conneries d’ailleurs… Une légende volée par-ci, par là, une plante pour se soigner, une recette pour s’aider. Déjà je pouvais prévoir les catastrophes, dès le matin au réveil, je les sentais. Et Maman me traitait de sorcière.

A l’école ? Soit disant intelligente mais indisciplinée, bavarde et hermétique à la discipline. Seules mes quelques bonnes notes arrivaient à me sauver. Rhaâââ… la discipline ! Ce mot me laisse rêveuse ! Beurk.. Beurk.. Plus papa m’en imposait, plus je protestais, je me rebellais. Cela nous a valut de belles engueulades, et mon départ à 18 ans.

Et puis un jour comme ça… après tant d’aventures, de joies et de peines, au moment ou je m’y attendais le moins ! Paf ! En pleine poire ! Mon père me dit qu’il est fier de moi ! Tout à trac, me dire que ce que je faisais c’était bien, que ce que j’étais devenue aussi… Alors là, il m’a coupé les pattes. Moi qui me sentais le Caliméro de service, à essayer de faire mes preuves tout le temps, montrer de quoi j’étais capable, me dépasser (dans le travail… et les conneries… On ne se refait pas !). Je devenais la fierté de mon père… Tada.

Ho ben ça pas empêcher d’autres coups de gueules hein ! Mais il a toujours été là pour moi quand même.

Et puis ben là.. Il nous abandonne, notre grand sorcier du bricolage, il nous laisse en plan. Il veut plus se battre ! Il est tout petit au fond de son lit, tout silencieux. Il y a bien encore un éclair ou deux au fond de ses yeux. Mais tout doucement, il part. Et moi avec tous mes grands pouvoirs, ben je peux pas le retenir.

Papa, je t’aime tu sais… Suis fière de toi moi aussi, je te l’ai déjà dit. Je te dis quoi d’autre ? Bon vent, garde le cap comme tu me disais si souvent…Que je voudrais te garder encore un peu contre vents et marées. Que tu m'as pas encore tout appris... Allez défends toi, bats toi s'il te plait. Je sais bien que c'est fini, que t'en peux plus, que tu veux partir.

Dites docteur… On peut s’arrêter là ?! Ça fait mal. Et puis je veux le voir encore une fois mon papa.

dimanche 2 août 2009

Les états d'âme d'un balai




Mon balai ne va pas fort en ce moment, il toussote, renâcle au démarrage, poussif dans son envolée, bref me fait passer des vols éprouvants et décoiffants. Il doit m’en vouloir encore de cette fameuse soirée ou je l’ai sorti de sa remise pour faire des essais de vols (pitoyables) sous l’emprise de la boisson. Comme signe de rébellion, il m’ a laissé suspendu tel un jambon à mon vieux chêne. Et depuis, je dois bien le dire, il me tire une gueule de trois pieds de long…C’est donc décidé, je l’envoie en réparation !

J’arrive a dénicher sa notice dans mon vieux chaudron usé et appelle le fameux numéro vert ou un homme mal embouché me répond :

- Ouais c’est pourquoi encore ?

- Heu … Bonjour Monsieur, j’ai mon balai qui a pas mal de difficulté à voler en ce moment.

- Numéro de plaque, numéro de modèle me demande-t-il d’un grognement.



Je cours cherche sa carte de vol enfouie sous un tas de papiers, et reviens pantelante au téléphone,

- Allo…

- Bon alors ça viens oui ?

Il commence à m’échauffer les sangs lui, va falloir qu’il me parle meilleur et vite :

- Dites donc vous ? Vous ne pourriez pas être plus agréable ?

- Non pas envie ! Et si ça vous plait pas, allez vous faire voir ! Après tout, c’est pas moi qui suis emmerdé parce que mon balai ne vole pas !

Et là-dessus, il raccroche. Ça m’en laisse comme deux ronds de flancs, mais j’ai vraiment besoin de mon balai là ! Et je rappelle, en priant que ce numéro vert soit une société de téléopérateurs qui réorientent les appels.

- Ouais ! J’écoute

Merde ! Le même, je respire un bon coup, tant pis, je ne vais pas me faire avoir ce coup-ci,



- numéro 7425 36258, modèle AK 1257 Z, année 1992

- l’est plus sous garanti votre coucou !!

- Je sais monsieur, mais je voudrais le faire réparer.

- Ha c’est vous, miss politesse?! Ben ça va vous couter bonbon, feriez mieux d’en acheter un autre hein ! J’en ai des bons d’occasions au garage là, faudrait passer me voir, je vous fait une prime à la casse pour votre vieux là.

Cette idée ne me plait pas du tout ! J'en partagé pas mal avec ce balai là, j'ai eu toutes les peines du monde à m'y faire, c'est pas pour tout avoir à recommencer avec un autre.

- Attendez… On peut pas le réparer ? Il me convient tout à fait celui-là, et c’est la première fois qu’il me fait ça, je l’entretiens régulièrement.

- Ouais, ben z’avez qu’à venir, je vous ferais un devis… Mais ça risque d’être chérot, je vous préviens ! Et mes devis, y sont pas gratuits non plus.

Ben tiens ! Ça m’étonne pas ça ! Je volète (un coup en haut, en coup en bas) en m’armant de patience pour ne pas gueuler contre mon balai, et atterrie dans un nuage de poussière et d’odeur de gomme (j’y ai laissé une semelle dans le freinage). Un gros gars, cheveux hirsutes et gras, marcel blanc maculé de traces noires et graisseuses, poils de balai coincés entre les dents sort du garage. Mon balai et moi avons un recul de peur et de dégoût. Le type, les mains prisent dans un chiffon me détaille et la tête aux pieds et a un sourire égrillard. (ha non alors ! Tu peux te brosser mon vieux)

- C’est la petite dame du téléphone ? L’est ou son vieux coucou ?

Mon balai se cache derrière moi, je sens ses joncs qui tremble, il pousse un couinement étranglé. Je ressens la même peur. Par la porte entrouverte, de l’atelier j’aperçois un pauvre balai décortiqué, les joncs pendants, le manche scié.

- Alors l’a quoi le balai ?

Le balai, se plante devant moi, et sautille d’un air joyeux. Me passe entre les jambes, me soulève et m’envole haut dans le ciel. Je jette un regard en arrière, le gars a les mains posées sur sa taille, et secoue la tête d’un air désabusé, il jette son chiffon par terre qu’il trépigne de colère. Le vol de retour est plus que surprenant, mon balai n’en finit pas de me montrer ses prestations ; retournés, loopings, plongeons… j’en ai le cœur au bord des lèvres. Un atterrissage en douceur devant ma chaumière, et mon balai se dandine.

- Ok, j’ai compris ! Tu me faisais la gueule c’est ça ?

Acquiescements du manche

- Et tu crois vraiment que j’allais t’échanger ou te faire découper en rondelles par ce vieux machin ? Mais.. Je tiens à toi, j’en veux pas d’un autre, moi ! On va faire encore un long bout de route ensemble, et on va devoir se supporter longtemps.

Mon balai me saute au cou.

Et dire que c’est à mon balai que j’ai faite la plus belle des déclarations.